小満 Shôman – Légers mûrissages

21 mai, début de Shôman et jour de mon anniversaire, nous prenons le bateau sur la mer Baltique en direction de l’île de Lidingo et de Millesgården. Journée un peu hors du temps dan l’étendue de ce vaste jardin parsemé des œuvres du sculpteur Carl Milles qui a perfectionné son art au début du XXème siècle dans l’atelier de Rodin. Le soir, nous retrouvons Imor pour aller dîner dans un restaurant au bord du canal Sickla. Lumière du soir sur l’eau, mets délicieux, amitié et course le long du quai pour attraper le dernier bac.

Stockholm sous le ciel bleu, ses ocres magnifiés, ses habitants étendus au soleil sur les  chaises longues mises à disposition dans les jardins, et ses innombrables lilas. Partout ils jaillissent en grappes épaisses mauves, prune ou blanches, arbustes flexibles souvent de deux mètres de hauteur. Je reconnais la ville visitée il y a trente ans avec le décalage du temps passé, de ses couleurs de printemps et la lumière d’un printemps aussi tardif que vif. Z, un ami d’Imor avec qui nous dînons un soir chez lui, nous explique que nous avons la chance de voir les Suédois d’été souriants, ouverts, à l’inverse des Suédois d’hiver bougons, renfermés. On sent à quel point la lumière peut manquer dans ce pays.

Sentiment d’espace, de nature, dans une ville qui s’étend sur les jardins et les eaux confluentes de la Baltique et du lac Mälar. Beaucoup de marche et plaisir aussi des trajets en bus qui laissent contempler et photographier la géométrie fonctionnaliste, les bâtiments Art Nouveau ou néo-classiques de la ville.

Un soir nous dînons avec A, une amie d’enfance, très proche d’Imor que j’avais rencontrée il y a trente ans lors de mon premier séjour à Stockholm. Sans nous contacter directement, nous avons eu durant ces trente années des nouvelles l’une de l’autre par Imor qui sait si bien cultiver les liens. C’est une personne très singulière, que la vie a particulièrement blessée, et dont la présence émeut par son mélange de fragilité et d’intensité.

Nous prenons le bateau cette fois sur le lac Mälar pour aller passer une demi-journée au château de Drottningholm, le Versailles suédois. Nous ne verrons pas l’intérieur du théâtre où Imor et moi avions assisté à un concert (souvenir de la cantatrice qui vocalisait Strrrrinberrrrg !). Mais nous visitons l’intérieur du château avant de marcher dans le parc. Le pavillon chinois est en travaux. Sensation de nature vivace aux verts intenses.

Le jour nous réveille dès quatre heures du matin, l’intensité de la lumière est déjà très forte et si nous ne sommes pas encore à la période du soleil de minuit, la nuit reste longtemps très claire, à vingt-trois heures passées un reste de soleil couchant stagne à l’horizon. Devant nos trois double-fenêtres conjointes, deux hautes haies de lilas fleuris se balancent au gré du vent. En face, à une centaine de mètres, se dressent un immeuble identique au nôtre, de ce style fonctionnaliste des années trente, à la façade percée des mêmes rangées de trois fenêtres, avides de la lumière du Nord.

Pour notre avant-dernière journée, nous suivons les conseils de Z et retournons à Djurgården pour aller visiter la Thielska Galleriet et y admirer les peintures et lithographies de Munch, découvrir aussi les tableaux d’Eugène Jansson et de Strindberg. Nous passons ensuite un bon moment dans un champ de pommiers à Rosendals. Dernière soirée chez Imor qui nous a fait à dîner chaque soir de la semaine hormis celui où nous sommes allés au restaurant. Nous l’aidons à emballer des meubles qui partiront demain pour Paris.

De retour à Paris dans un printemps ruisselant de pluie, je me lance dans le travail sur le chapitre 4 de K. : des pages de notes avec la nécessité maintenant de construire, dans l’élan et les contraintes aussi nées des chapitres précédents. Un moment de déploiement un peu plus linéaire…

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