accostage

   à peine le jour      à l’horizon une ligne de terre émerge      la mer est moins forte       retournée vers le mur de la cabine, dort-elle ?      l’envie d’un café    un bon signe après la nausée d’hier     mais le bar est fermé      se dégourdir les jambes sur le pont      la côte est loin, encore si loin        les distances en mer sont trompeuses pour les profanes      he knew the magic monotony of existence between sky and water   hésite à retourner dans la cabine     même dans son sommeil elle semble hostile     il fallait pourtant bien lui parler de son carnet      sur le pont, un alignement de chaises longues vides, chacune ou presque pourvue d’un plaid épais       s’allonger ici pour finir la nuit en attendant l’ouverture du bar      les yeux fermés, les mots s’agitent dans la tête     le bourdonnement du bateau, l’éclaboussure des vagues      the magic monotony      combien de temps      maintenant des pas, des voix     la lumière vive du matin       la côte nette, si proche maintenant     beaucoup de bateaux    quel fourmillement, quelle effervescence       on n’aurait pas pu imaginer que le port d’une île perdue, juste une ombre sur la carte dépliée maintes fois, pouvait abriter une telle activité      port immense où mouillent d’énormes chalutiers, certains battant pavillon vietnamien     plusieurs transbordeurs pour relier les îles de l’archipel et même un cargo russe, le Paramouchir        il faudrait aller voir si elle est réveillée      à droite une rangée de hangars borde le quai des chalutiers sur lesquels s’entassent de grands cageots vides      plastique bleu vif      le ferry meugle en entrant dans le port     sur la gauche,  un front de mer simple, bordé d’arbres, une ligne harmonieuse d’immeubles bas, et là-bas tout au bout de la jetée un curieux édifice arrondi      un casino ?     on aperçoit aussi quelques constructions à travers la végétation des collines     entre la promenade du front de mer et le port de pêche, un grand bâtiment entouré d’un jardin et de grilles noires     un long marché aux tentures colorées s’étend du front de mer jusque devant le grand bâtiment     les cheveux relevés, elle apparaît sur la coursive     elle sourit     le ferry présente son flanc gauche au quai       côte à côte pour un instant, accoudés à la rambarde, assistant à l’accostage