Ses mains… ses mains aux ongles parfaitement soignés, qui griffent parfois incidemment ton cou quand elle y noue ta petite serviette… ses mains se détachent, elles tombent à terre et s’évanouissent dans la pénombre. Il ne reste que ce vide qui s’est ouvert on ne sait pas quand. Et cette décoloration du temps, plus de lumière vive, de soleil matinal, de gris profonds. Combien de temps déjà que les visages connus ont disparu ? Faut-il compter en secondes, en minutes, en heures cette durée qui ne s’écoule plus ? Faut-il continuer à guetter le moindre son, à attendre leur retour en tremblant ? Mais vient la nuit et les bruits qui rampent. Des jouets qui projettent leur ombre menaçante à travers la chambre. Il y a la peur sourde d’une présence indéfinie tapie dans un recoin. Une présence qui enfle, qui s’impose. Qui te poursuit dans le sommeil. Dans tes rêves d’enfant, modeste mouton dans un troupeau, allant parmi tes pairs quand surgissant sur le coteau voisin un point noir, la peur ancestrale, le loup qui s’élançait sur vos traces. Tu t’éveilles encore en sursaut, frissonnant de peur animale, en passe d’être dévorée.

Texte écrit pour l’atelier En quête du fantastique proposé par François Bon durant l’été 2015.